Projet de décret infirmier : l'autonomie en danger ?

La consultation infirmière réduite à une liste d'actes, loin de l'esprit de la loi de juin !

Le projet de décret en Conseil d’État sur la profession d’infirmier, actuellement en finalisation, constitue une étape attendue depuis la promulgation de la loi du 28 juin dernier. Il sera complété dans ses orientations et organisation pratique par une réglementation définie par des arrêtés.

S’il présente des avancées notables pour notre profession, il suscite déjà de fortes réserves pour notre syndicat, y compris de la part de l’Ordre national des infirmiers qui dénonce un texte « très éloigné des décisions du Parlement ».

 Il est en effet choquant de limiter la consultation infirmière, dans le cadre du rôle propre défini par le Code de la santé publique, à une simple liste d’actes, alors que la loi prévoyait une compétence globale et accordait sa confiance à l’infirmier pour élaborer une véritable consultation. C’est un coup porté à l’autonomie légitime que la loi entendait reconnaître à l’infirmière libérale dans son domaine d’activité, qu’elle maîtrise.                                                         

📌 Résumé du projet de décret

Il précise les domaines d’activité et compétences des infirmiers diplômés d’État.

  • Activités et rôle global : analyse, organisation, réalisation et évaluation des soins, en coordination avec les autres acteurs de santé, du social, du médico-social et de l’éducatif ;
  • Diagnostic infirmier : officiellement reconnu, permettant de définir les interventions adaptées pour la personne ou le groupe ;
  • Consultation infirmière : définie comme un entretien clinique complet, incluant recueil et analyse de données, évaluation et ajustement des soins, prescriptions infirmières si nécessaire, organisation et coordination dans le parcours de santé ;
  • Missions élargies : dépistage, prévention, éducation thérapeutique, évaluation de l’autonomie, participation au soulagement de la douleur, accompagnement en fin de vie, actions de santé publique ;
  • Prescription : possibilité de prescrire certains produits de santé et examens complémentaires (liste fixée par arrêté) ;
  • Formation et recherche : rôle dans le développement des compétences, production de documents pour améliorer qualité et sécurité des soins ;
  • Rôle propre et délégation : l’infirmier pourra initier et évaluer certains actes, confier sous sa responsabilité certains soins aux aides-soignants, auxiliaires de puériculture et accompagnants éducatifs et sociaux ;
  • Urgences : habilitation à mettre en œuvre des protocoles d’urgence en l’absence de médecin, avec gestes conservatoires nécessaires ;
  • Autres missions : actions de secours, médecine de catastrophe, aide humanitaire.

 

Si ce projet acte des avancées importantes – reconnaissance du diagnostic et de la consultation infirmière, élargissement des missions – il reste en retrait par rapport à ce qu’a validé le Parlement.

L’Ordre national des infirmiers l’a rappelé : le texte tel qu’il est proposé « est très éloigné des décisions du Parlement ».

Pour l’Onsil, il est indispensable que les arrêtés et décrets d’application respectent l’esprit de la loi, garantissent une réelle reconnaissance de nos compétences et s’accompagnent d’une valorisation statutaire, conventionnelle et financière. Sans cela, cette réforme risquerait de n’être qu’une modernisation de façade.

👉 Il faut souhaiter que le décret soit rapidement complété et mis en application par des arrêtés, afin que les discussions conventionnelles en cours puissent aboutir à une nomenclature en face des nouvelles missions confiées aux infirmiers.

L’exercice individuel, qui demeure majoritaire dans le champ des soins primaires, doit être préservé : l’autonomie et l’indépendance professionnelle des infirmiers libéraux sont sacrées.

Le recours à un exercice coordonné (maison de santé pluriprofessionnelle, équipe de soins primaires, centre de santé) doit rester réservé aux prises en charge qui dépassent notre rôle propre.

Les soins primaires sont apportés par chaque professionnel de santé. Ils garantissent un accès à une prise en charge globale et de proximité, intégrant éducation, prévention, coordination, traitement et surveillance.

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